Le Net imposable et l’impôt sur le revenu

1. Qu’est-ce que le salaire net imposable ?
Le salaire net imposable est un montant de revenu calculé à des fins purement fiscales, à partir du salaire brut d’un employé. Il s’agit de la part du salaire brut qui servira de base au calcul de l’impôt sur le revenu (IR) du salarié. Autrement dit, c’est le montant du salaire déclaré à l’administration fiscale pour être soumis à l’imposition. Ce montant figure sur le bulletin de paie de chaque salarié – et depuis janvier 2022, il est devenu obligatoire d’y faire figurer le montant net imposable dans le « bloc fiscal » du bulletin. En revanche, le net imposable en lui-même n’est généralement pas directement transmis à l’administration fiscale chaque mois (ce sont plutôt la retenue à la source effectuée et la rémunération nette fiscale globale qui sont déclarées via la DSN, voir plus loin).
Le net imposable se distingue du salaire « net à payer » perçu par le salarié. Ce dernier (net à payer) correspond à ce qui reste après toutes les retenues sociales et fiscales éventuelles sur le bulletin de paie, tandis que le net imposable sert uniquement de référence pour le calcul de l’impôt. Il est donc important de comprendre comment on passe du salaire brut au net fiscal imposable.
2. Calcul du net imposable sur la fiche de paie
De quoi part-on ? Généralement, on part du salaire brut (aussi appelé brut fiscal lorsqu’on parle de la partie imposable du brut). Le brut correspond au salaire avant toute retenue. Dans la plupart des cas, le brut « fiscal » et le brut « social » sont identiques (ce qui est soumis à cotisations sociales est aussi imposable).
Que déduit-on du brut pour obtenir le net imposable ? On retranche du brut les cotisations sociales salariales déductibles du revenu imposable. En effet, certaines cotisations obligatoires payées par le salarié sont admises en déduction du revenu imposable, ce qui réduit d’autant la base d’imposition. Parmi ces cotisations salariales déductibles du salaire brut, on compte notamment :
- Les cotisations de Sécurité sociale (assurance maladie, assurance vieillesse de base, etc.) et les contributions chômage obligatoires – ces cotisations salariales sont intégralement déductibles du revenu imposable.
- Les cotisations de retraite complémentaire obligatoire (régime AGIRC-ARRCO, y compris les contributions AGFF/CEG, CET et éventuellement la cotisation APEC pour les cadres) – elles aussi sont déductibles du revenu imposable.
- Les cotisations de prévoyance complémentaire obligatoire (garanties incapacité de travail, invalidité, décès) – elles sont déductibles, mais sous certaines limites fixées par la loi.
- Les cotisations à une éventuelle complémentaire santé collective (mutuelle d’entreprise) payées par le salarié – la part salariale de la mutuelle est également déductible du revenu imposable.
- La part déductible de la CSG (Contribution sociale généralisée) prélevée sur le salaire. Le taux de CSG sur les salaires est de 9,2%, dont 6,8 points sont considérés comme déductibles de l’IR et 2,4 points non déductibles. En pratique, la CSG est souvent prélevée en deux lignes sur le bulletin de paie (CSG déductible et CSG non déductible). Seule la portion déductible (6,8%) vient diminuer le net imposable, tandis que la portion non déductible (2,4%) ne réduit pas le revenu imposable. De même, la CRDS (Contribution au remboursement de la dette sociale, 0,5%) est intégralement non déductible.
👉 Astuce de calcul : Sur de nombreux bulletins de salaire, on trouve un total des « cotisations salariales » qui inclut à la fois les cotisations déductibles et non déductibles. Pour retrouver le net imposable à partir du brut, on peut donc soustraire ce total du brut puis rétablir (ajouter) la part de CSG/CRDS non déductible. Cela revient au même que de déduire uniquement les cotisations déductibles. En formule simplifiée, on a :
Montant net imposable = Montant brut – (total des cotisations salariales déductibles) + (cotisations patronales imposables éventuelles).
En effet, certaines contributions de l’employeur doivent être ajoutées au salaire imposable (on parle de réintégration fiscale dans le net imposable). C’est le cas lorsque l’employeur finance des régimes de protection sociale supplémentaires pour le salarié, dans certaines limites :
- Mutuelle santé d’entreprise (part patronale) : depuis 2013, la part payée par l’employeur pour la complémentaire santé est considérée comme un avantage imposable pour le salarié. Elle doit donc être réintégrée dans le net imposable. Autrement dit, la contribution employeur à la mutuelle est traitée comme un complément de salaire sur le plan fiscal. Plus l’employeur finance la mutuelle, plus le revenu imposable du salarié augmente, ce qui peut rendre une prise en charge à 100% de la mutuelle désavantageuse fiscalement pour le salarié. (Notons que cette part patronale reste également soumise à CSG-CRDS.)
- Cotisations patronales de prévoyance ou de retraite supplémentaire : l’employeur peut contribuer à des régimes de prévoyance (incapacité, décès) ou de retraite supplémentaire (article 83, PER d’entreprise, etc.) pour ses salariés. Ces contributions patronales sont en principe un avantage pour le salarié, mais la loi prévoit un plafond d’exonération fiscale : en-deçà de ce plafond, la part patronale est non imposable, au-delà elle devient imposable (réintégrée). Ce plafond global (pour chaque salarié) est égal à 5% du Plafond Annuel de la Sécurité sociale (PASS) + 2% de la rémunération annuelle brute, sans excéder 2% de huit fois le PASS. Concrètement, cela signifie par exemple qu’en 2025 la limite était d’environ 2 355 € (5% du PASS 2025) plus 2% du salaire annuel, le tout plafonné à ~2% de 8 PASS (soit environ 7 500 €). Tant que la contribution de l’employeur reste sous ce seuil, elle reste non imposable; mais la fraction qui dépasse ce plafond est ajoutée au net imposable du salarié. Ce plafond de déductibilité vaut pour l’ensemble mutuelle + prévoyance lourde financés par l’employeur.
À part, un plafond spécifique s’applique aux cotisations de retraite supplémentaire (PER d’entreprise, etc.) : ces cotisations (patronales + salariales) sont exonérées d’impôt jusqu’à 8% de la rémunération annuelle brute, dans la limite de 8 PASS. Au-delà de 8% du salaire (ou au-delà de 8 PASS), elles sont imposables. Par exemple, pour 2024, le plafond absolu de retraite sup. était ~29 675 €.
En résumé, pour obtenir le net imposable à partir du brut, on retire toutes les cotisations salariales déductibles (y compris la CSG déductible), et on rajoute éventuellement les éléments à réintégrer (comme la part employeur de mutuelle ou de prévoyance excédentaire).
Exemple simplifié de calcul : Soit un salarié avec un salaire brut mensuel de 3 000 €. Supposons que les cotisations salariales déductibles (sécu, retraite, chômage, CSG déductible…) totalisent 600 €, et que la CSG/CRDS non déductible soit 80 €. Si l’employeur ne paye pas de mutuelle ou autres avantages imposables, le net imposable sera : 3 000 – 600 = 2 400 € (on aurait aussi pu faire 3 000 – (600+80) + 80, ce qui revient au même). En revanche, si l’employeur paye 50 € de mutuelle santé pour ce salarié, ces 50 € s’ajoutent au net imposable, qui devient 2 450 €.
3. Heures supplémentaires exonérées d’impôt
Depuis la loi Tepa de 2007 puis surtout à nouveau depuis 2019, la rémunération des heures supplémentaires bénéficie d’un régime fiscal de faveur. En effet, depuis le 1er janvier 2019, les heures supplémentaires effectuées par un salarié sont exonérées d’impôt sur le revenu, dans la limite d’un plafond annuel.
- Plafond d’exonération : Initialement fixé à 5 000 € net imposable par an (soit environ 5 358 € bruts par an), ce plafond a été relevé à 7 500 € par an depuis le 1er août 2022 (loi sur le pouvoir d’achat). Ce nouveau plafond de 7 500 € s’applique aux revenus 2022 et suivants, c’est-à-dire qu’un salarié peut, chaque année, percevoir jusqu’à 7 500 € (net fiscal) au titre d’heures supplémentaires sans payer d’impôt sur ce montant. Au-delà de ce plafond, la portion excédentaire redevient imposable selon les règles normales. Par exemple, pour 2024, un salarié ayant gagné 7 938 € net d’heures sup verra 7 500 € exonérés et 438 € soumis à l’impôt.
- Traitement sur le bulletin de paie : Le montant des heures supplémentaires défiscalisées figure sur le bulletin, généralement en mention complémentaire du net imposable. On comprend que ce montant d’heures sup exonérées est exclu du net imposable (puisqu’il n’est pas soumis à impôt). Toutefois, un point d’attention concerne la CSG : la rémunération des heures supplémentaires exonérées reste soumise à CSG/CRDS, mais la CSG afférente à ces heures exonérées est, elle, intégralement non déductible du revenu imposable. Autrement dit, on ne peut pas déduire 6,8% de CSG sur des sommes qui ne sont pas elles-mêmes imposables. Dans la pratique, certains logiciels de paie calculent la CSG de la même manière sur l’ensemble des heures sup, qu’elles soient exonérées ou non. Il convient alors de retrancher manuellement (ou via une régularisation de paie) la part de CSG déductible liée aux heures sup exonérées, afin de ne pas la déduire à tort du net imposable.
Remarque : Le plafond annuel de 7 500 € correspond à un montant net imposable. En équivalent brut, cela représente environ 9 100 € brut de rémunération supplémentaire (en tenant compte des cotisations exonérées de certaines charges sociales). Par ailleurs, ce plafond inclut également les éventuelles contreparties financières des jours de RTT auxquels le salarié renonce (monétisation de RTT) qui, sous certaines conditions, sont elles aussi exonérées d’IR dans cette limite de 7 500 €.
4. La base du prélèvement à la source (PAS) : net imposable et exceptions
Depuis le 1er janvier 2019, l’impôt sur le revenu est prélevé à la source, c’est-à-dire directement par l’employeur sur le salaire versé, chaque mois. En règle générale, la base de calcul du Prélèvement À la Source (PAS) sur les salaires correspond précisément au salaire net imposable calculé comme ci-dessus. Autrement dit, l’employeur applique le taux d’imposition transmis par l’administration fiscale sur le montant du net imposable du mois. Cette base mensuelle imposable est d’ailleurs reprise dans la Déclaration Sociale Nominative (DSN) mensuelle (rubrique « Base assujettie au PAS » S21.G00.50.013) et figurera aussi sur le bulletin de paie dans le bloc fiscal.
Cependant, dans certains cas particuliers, la base du PAS s’écarte du net imposable classique. Voici les principaux cas à connaître :
Indemnités Journalières de Sécurité Sociale (IJSS) en cas d’absence maladie, maternité…
Les indemnités journalières versées par l’Assurance Maladie (Sécurité sociale) remplacent partiellement le salaire en cas d’arrêt de travail pour maladie, accident, maternité, etc. Fiscalement, ces indemnités sont imposables sous certaines conditions :
- Indemnités maladie (arrêt de travail pour maladie non professionnelle) : elles sont imposables comme un salaire uniquement pendant les 60 premiers jours d’arrêt. Au-delà de 60 jours consécutifs d’arrêt, les IJ maladie cessent d’être imposables (dans la plupart des cas, un arrêt de plus de 60 jours entre dans le cadre des affections de longue durée exonérées d’IR). En pratique, lorsque l’employeur pratique la subrogation (c’est-à-dire qu’il reçoit les IJSS et les reverse au salarié en continuant à maintenir le salaire), il devra inclure les IJSS dans la base imposable du PAS uniquement pour les 60 premiers jours d’arrêt. Les indemnités correspondant à la période au-delà de 60 jours sont exclues de l’assiette du PAS (non imposables tant qu’on n’a pas la certitude qu’elles sont imposables). À noter : la CSG sur ces IJSS maladie subrogées est calculée au taux normal mais seule la part correspondant aux IJ imposables (60 premiers jours) peut être considérée comme CSG déductible.
- Indemnités maternité / paternité : elles sont intégralement imposables comme des salaires. Contrairement à la maladie, il n’y a pas d’exonération au-delà d’un certain délai – toutes les indemnités journalières de congé maternité, paternité ou adoption sont imposables à 100%. En DSN, l’employeur en subrogation ajoutera donc la totalité des IJ maternité/paternité perçues à la base du PAS du salarié. (La CSG sur ces IJ est en partie déductible à hauteur de 6,8%, comme pour un salaire habituel.)
- Indemnités pour accident du travail ou maladie professionnelle : elles sont partiellement imposables. La loi prévoit que ces indemnités sont exonérées à hauteur de 50% de leur montant. En conséquence, l’employeur n’intègre dans la base imposable que 50% des IJ accident du travail/maladie pro subrogées versées au salarié. L’autre moitié est non imposable. (La CSG sur ces IJ est donc calculée mais on ne peut en déduire que la part correspondant à la moitié imposable.)
En résumé, dans le calcul du PAS mensuel, si vous versez des indemnités journalières de sécurité sociale par subrogation :
- incluez 100% des IJ maladie des deux premiers mois d’arrêt, puis 0% au-delà,
- incluez 100% des IJ maternité/paternité,
- incluez 50% des IJ accident du travail ou maladie pro,
à chaque fois en ajustant la part de CSG déductible en proportion. Ces règles ont pour but de coller au plus près à l’imposition finale due sur ces revenus particuliers.
Apprentis et stagiaires
Les apprentis (en contrat d’apprentissage) et les stagiaires en entreprise bénéficient d’une exonération d’impôt sur le revenu dans certaines limites. En effet, les salaires versés à un apprenti ou la gratification de stage d’un étudiant sont exonérés d’IR jusqu’à concurrence du SMIC annuel (plafond fixé par l’article 81 bis du CGI). Concrètement, cela veut dire que chaque année, la somme des revenus de stage ou d’apprentissage est non imposable jusqu’à un montant égal à 12 mois de SMIC.
Pour l’année 2022, ce plafond était de 19 237 € (SMIC annuel 2022). Ce montant est revalorisé chaque année en fonction des hausses du SMIC. Par exemple, pour les revenus de l’année 2024, le plafond d’exonération apprenti/stagiaire est de 21 273 €. En deçà de ces montants, le jeune n’a pas à payer d’impôt sur ses revenus d’apprentissage ou de stage. Ainsi, dans la DSN, la base du PAS à déclarer pour un apprenti ou un stagiaire sera nulle tant que sa rémunération cumulée depuis le début de l’année ne dépasse pas le SMIC annuel. Dès qu’il dépasse ce seuil, seule la fraction au-delà du plafond devient imposable (et soumise au PAS). Sur le bulletin de paie, l’employeur doit indiquer clairement la part du salaire exonérée (souvent via une mention du type « dont exonération apprentis … € »).
Exemple : un apprenti a perçu 18 000 € en 2024, entièrement exonérés car sous 21 273 €. Son net imposable annuel sera 0 €. Un autre apprenti a perçu 23 000 € en 2024 : il sera imposable sur 23 000 – 21 273 = 1 727 € (cette fraction figurera en net imposable). Idem pour un stagiaire gratifié.
Contrats courts et taux neutre
Pour les salariés en contrat court (CDD de courte durée, intérim, saisonnier, etc.) d’une durée maximale de 2 mois, la loi a prévu un dispositif particulier concernant le prélèvement à la source lorsque l’employeur n’a pas de taux personnalisé à appliquer. En temps normal, si le fisc n’a pas transmis de taux de PAS personnalisé pour un salarié (par exemple un nouveau salarié qui n’était pas dans la base des impôts), l’employeur doit appliquer un taux par défaut dit « taux neutre ». Ce taux neutre est fixé par barème en fonction du montant du salaire, en supposant une personne célibataire sans enfant. Or, pour les contrats très courts, ce taux neutre pouvait conduire à un PAS trop élevé par rapport à la situation réelle du salarié sur l’année (effet de sur-prélèvement en l’absence de revenus les autres mois).
C’est pourquoi un abattement spécial s’applique sur la base imposable des contrats courts durant les deux premiers mois : l’employeur doit calculer le PAS après application d’un abattement équivalent à 50% du SMIC net imposable mensuel. Cet abattement réduit artificiellement la base imposable soumise au taux neutre, afin de diminuer le prélèvement pour ces salariés. Si le contrat dépasse 2 mois ou si un taux personnalisé est reçu entre-temps, l’abattement cesse de s’appliquer.
En pratique, cet abattement contrat court est un montant fixe, recalculé chaque année en fonction de l’évolution du SMIC. Il correspond à la moitié d’un SMIC mensuel net imposable (c’est-à-dire SMIC brut – cotisations, sur une base temps plein). Par exemple, début 2022 cet abattement était de 657 € par mois, puis il a été réévalué à 675 € en mai 2022 et 688 € en août 2022 suite aux revalorisations successives du SMIC. Début 2025, l’abattement s’établissait autour de 739 € par mois (SMIC net augmenté au 1ᵉʳ novembre 2024) d’après les chiffres officiels. Chaque année, les pouvoirs publics publient le nouveau montant de l’abattement 1/2 SMIC (par exemple 739 € au 1/1/2025). L’employeur applique donc ce montant en réduction de la base mensuelle lors du calcul du PAS (uniquement si le taux neutre s’applique et dans la limite des deux premiers mois).
Illustration : un employé en CDD d’un mois touchant 1 500 € net imposable. Sans abattement, le taux neutre correspondant (par exemple ~4%) s’appliquerait sur 1 500 €. Avec l’abattement de ~739 €, le PAS sera calculé sur seulement 761 € (1 500 – 739), réduisant le prélèvement. Si ce même salarié était ensuite prolongé au-delà de 2 mois et toujours sans taux personnalisé, à partir du 3ᵉ mois l’abattement ne s’appliquerait plus. – Bien entendu, si l’employeur reçoit entre-temps un taux de PAS personnalisé (parce que le salarié a fait sa déclaration de revenus précédente), alors on applique le taux personnalisé sans abattement dès sa réception.
5. La Rémunération Nette Fiscale (RNF) déclarée en DSN
Lors de la mise en place du prélèvement à la source, une notion importante est apparue dans les déclarations sociales : la Rémunération Nette Fiscale (RNF). Il s’agit du montant de revenu net imposable cumulé sur l’année qui est déclaré par l’employeur à l’administration fiscale via la DSN (rubrique S21.G00.50.002 – Rémunération nette fiscale). La Direction générale des finances publiques (DGFiP) utilise cette RNF pour pré-remplir la déclaration de revenus du salarié et pour s’assurer de la cohérence avec les montants d’impôt prélevés à la source. En quelque sorte, la RNF correspond au total des « nets imposables » versés sur l’année, avec éventuellement quelques retraitements demandés par l’administration fiscale.
Évolution depuis 2020-2021 : auparavant, la RNF englobait simplement le net imposable tel quel. Mais depuis 2020/2021, les règles ont changé concernant les heures supplémentaires exonérées d’impôt. La RNF ne doit plus inclure les montants défiscalisés au titre des heures sup (ou d’autres revenus exonérés). En d’autres termes, la RNF déclarée est calculée « hors montants défiscalisés ». Cela signifie que si un salarié a, par exemple, 2 000 € d’heures supplémentaires exonérées dans l’année, ces 2 000 € ne figureront pas dans la RNF – seul le reste de ses revenus imposables y figurera.
Pourquoi cette exclusion ? Tout simplement parce que la RNF sert au calcul du prélèvement à la source et à la détermination de certains droits, et l’administration ne veut pas comptabiliser dans ce total des sommes qui de toute façon ne sont pas soumises à l’impôt sur le revenu. Par exemple, la RNF (hors heures sup exonérées) est utilisée pour le calcul de certaines allocations sous conditions de ressources, comme les allocations logement par la CAF. Néanmoins, pour que ces organismes sachent tout de même combien le salarié a perçu au total, les employeurs doivent depuis 2024 déclarer à part le montant net des heures sup exonérées (dans un bloc spécifique S21.G00.58 en DSN). Ainsi, la CAF ou autre pourra ajouter ce montant au RNF pour évaluer les ressources réelles, tandis que la DGFiP continuera d’utiliser la RNF seule pour l’établissement de l’impôt.
En résumé, la RNF correspond aujourd’hui au net imposable du salarié sans les heures supplémentaires défiscalisées (ni autres éléments exonérés d’IR). C’est cette RNF qui figure sur les attestations fiscales annuelles et que le fisc prend en compte pour l’impôt à la source. Le montant des heures sup exonérées, lui, est suivi séparément.
6. Du net imposable au calcul de l’impôt sur le revenu : quelques repères fiscaux
Le net imposable salarial n’est qu’une partie de l’équation de l’impôt sur le revenu. Pour le contribuable, ce montant va s’ajouter aux autres revenus éventuels du foyer fiscal, puis subir diverses déductions et être soumis au barème progressif de l’impôt. Voici les grandes étapes et notions clefs de la fiscalité des revenus en France, afin de mieux situer le rôle du net imposable dans l’ensemble :
- Revenu brut global et revenu net global : L’administration fiscale additionne l’ensemble des revenus imposables perçus par les membres du foyer fiscal (le ménage). Cela inclut les salaires (nets imposables), mais aussi d’autres catégories de revenus : pensions de retraite ou d’invalidité, revenus des indépendants (bénéfices industriels et commerciaux – BIC, bénéfices non commerciaux – BNC, bénéfices agricoles – BA), revenus fonciers (loyers, revenus immobiliers), revenus de capitaux mobiliers (intérêts, dividendes), plus-values éventuelles, rentes, pensions alimentaires reçues, etc. Ce total constitue le revenu brut global du foyer. Ensuite, on déduit de ce revenu brut global certaines charges déductibles prévues par la loi pour obtenir le revenu net global. Parmi ces charges déductibles, on trouve par exemple les pensions alimentaires versées à un proche (sous conditions et plafonds), les cotisations aux produits d’épargne retraite volontaires (PER, retraite Madelin, etc., déductibles dans la limite de 10% des revenus professionnels), les éventuelles cotisations syndicales, certains déficits (par exemple un déficit foncier imputable sur le revenu global dans la limite de 10 700 €), etc. Une fois ces déductions effectuées, on obtient le revenu net global imposable du foyer sur l’année. C’est ce revenu net global qui va servir de base au calcul de l’impôt, après encore application de quelques abattements ou déductions propres à chaque type de revenu.
Par exemple, pour les salaires et assimilés, il existe une déduction forfaitaire pour frais professionnels de 10% (censée couvrir les frais liés à l’emploi : transport, repas, etc.). Cette déduction de 10% s’applique après la déclaration, automatiquement par le fisc, sur le montant des salaires imposables. Elle est au minimum de 504 € par an et au maximum de 14 426 € par foyer (pour l’imposition des revenus 2024, mis à jour 2025). Concrètement, cela signifie que le fisc ne vous impose que sur 90% de vos salaires (dans la limite des plafonds indiqués). Un couple marié bénéficie de l’abattement séparément sur chacun des deux salaires. Il est toutefois possible de renoncer à la déduction de 10% et opter pour la déduction des frais réels (si vos frais professionnels effectifs dépassent l’abattement forfaitaire). Dans ce cas, il faut calculer et déclarer le montant exact de vos frais, et aucun abattement forfaitaire n’est appliqué. Le choix entre 10% et frais réels se fait individuellement pour chaque déclarant (par exemple, dans un couple, l’un peut rester au forfait 10% et l’autre opter pour ses frais réels). Par défaut, si vous ne cochez pas l’option frais réels, l’administration appliquera l’abattement de 10% automatiquement. (À noter : les pensions de retraite bénéficient aussi d’un abattement de 10%, plafonné autour de 4 258 € par foyer en 2024, distinct de celui des salaires.)
- Revenu fiscal de référence (RFR) : en parallèle du calcul de l’impôt, l’administration calcule un revenu fiscal de référence, qui intègre le revenu net imposable augmenté de certains revenus exonérés ou soumis à des prélèvements forfaitaires. Le RFR est mentionné sur votre avis d’imposition et sert de base pour déterminer l’éligibilité à de nombreuses aides ou dispositifs (par exemple, exonération de taxe d’habitation, bourses, tarifs sociaux, etc.). Attention : bien que les heures supplémentaires soient exonérées d’IR, elles restent jusqu’à présent incluses dans le RFR du foyer. Cela peut créer des effets de seuil pour certaines aides sociales, pénalisant des ménages modestes qui font des heures sup – d’où une proposition de loi récente visant à exclure les heures sup du RFR à l’avenir. De même, d’autres revenus « exonérés » comme les intérêts des Livrets défiscalisés, certaines plus-values exonérées, etc., peuvent réintégrer le RFR. Il est donc possible que votre revenu fiscal de référence soit supérieur à votre revenu effectivement imposé. Il convient d’y prêter attention, car de nombreux organismes utilisent le RFR pour apprécier votre situation fiscale globale.
- Quotient familial et barème progressif : Le revenu imposable du foyer (après abattements et déductions éventuelles) est soumis au barème progressif de l’impôt sur le revenu, en tenant compte du quotient familial du foyer. Le quotient familial correspond au nombre de parts fiscales attribuées au foyer en fonction de la situation familiale : généralement 1 part par adulte (2 parts pour un couple marié ou pacsé soumis à imposition commune) et 0,5 part par enfant à charge (les deux premiers enfants rapportent 0,5 part chacun, puis à partir du 3ᵉ enfant chaque enfant compte pour 1 part). Ce mécanisme permet de moduler l’impôt selon la taille de la famille. En pratique, le fisc divise le revenu imposable total du foyer par le nombre de parts, applique le barème progressif à ce revenu par part, puis multiplie l’impôt obtenu par le nombre de parts pour obtenir l’impôt total du foyer.
Exemple simplifié : Un couple marié avec 2 enfants (3 parts) a un revenu net imposable total de 55 950 €. On divise 55 950 € par 3 = 18 650 €. On calcule l’impôt sur 18 650 € (1 part) selon le barème 2024 : la tranche jusqu’à 11 497 € à 0%, puis 11% sur la fraction 11 498 € – 18 650 € = 786,83 € d’impôt par part. On multiplie ensuite par 3 parts = ~2 360 € d’impôt brut pour le foyer.
Le barème d’imposition comporte plusieurs tranches à taux progressifs : par exemple 0% jusqu’à 10 777 € (revenus 2023), 11% au-dessus jusqu’à ~27 500 €, 30% au-dessus jusqu’à ~75 000 €, 41% jusqu’à ~168 000 € et 45% au-delà (les seuils exacts varient chaque année). Chaque foyer se voit ainsi appliquer un taux marginal d’imposition correspondant à la dernière tranche atteinte par son revenu par part. Dans l’exemple du célibataire gagnant 32 000 € annuels, le taux marginal est de 30%, même si en moyenne son taux effectif est bien plus faible. Le taux marginal sert notamment à estimer l’avantage des réductions d’impôt (économies réalisées à la marge).
- La décote : Pour les contribuables dont le calcul d’impôt aboutit à un petit montant, le fisc applique automatiquement une réduction appelée décote. La décote vise à atténuer l’entrée dans l’impôt et à réduire à zéro l’impôt des contribuables dont le montant serait très faible. Pour les revenus 2024 (impôt 2025), la décote s’applique si l’impôt brut est inférieur à 1 965 € pour une personne seule ou 3 249 € pour un couple (imposition commune). Si l’impôt calculé dépasse ces seuils, pas de décote. En dessous, le calcul de la décote se fait selon une formule définie (par exemple, pour un célibataire : décote = 789 € – 45,25% de l’impôt brut, pour un couple : 1 470 € – 45,25% de l’impôt brut). En pratique, cela revient en 2025 à annuler l’impôt si celui-ci est très faible et à le réduire significativement s’il est juste au-dessus de zéro, de manière lissée. La décote permet ainsi à de nombreux foyers modestes de ne pas payer d’impôt ou d’en payer un montant symbolique seulement.
- Réductions et crédits d’impôt : Enfin, une fois l’impôt brut déterminé (après quotient familial et éventuelle décote), il peut encore être diminué par des réductions d’impôt et crédits d’impôt auxquels le foyer a droit. Les réductions d’impôt sont des montants venant directement diminuer l’impôt à payer, dans la limite de celui-ci (par exemple : réduction pour dons aux œuvres, réduction pour frais de scolarisation des enfants, etc.). Les crédits d’impôt, eux, sont remboursables si leur montant dépasse l’impôt dû (par exemple : crédit d’impôt pour emploi d’un salarié à domicile, garde d’enfants, transition énergétique, etc.). Ces dispositifs ne modifient pas le revenu imposable ni le net imposable, mais ils viennent in fine alléger le montant à payer. Ils s’ajoutent aux exonérations éventuelles (par exemple un revenu entièrement exonéré comme une prime exceptionnelle sous conditions, une allocation exonérée, etc.). Le système français prévoit également certains régimes forfaitaires optionnels – par exemple le prélèvement forfaitaire unique (PFU) de 30% qui s’applique d’office sur les revenus mobiliers (intérêts, dividendes) sauf option contraire, ou le prélèvement libératoire pour certains auto-entrepreneurs (micro-BIC, micro-BNC) qui permet de payer un pourcentage fixe de chiffre d’affaires en guise d’impôt. Ces modalités spécifiques font que certains revenus ne passent pas par le barème progressif ni par le net imposable classique (ils sont alors exclus du revenu imposable global). Chaque contribuable doit donc évaluer l’ensemble de sa situation pour optimiser son imposition.
En conclusion, le salaire net imposable figurant sur votre fiche de paie est un élément central de votre imposition, car c’est à partir de lui que l’impôt à la source est prélevé et que votre revenu est déclaré. Il est crucial de vérifier que ce montant est calculé correctement (déductions et réintégrations appropriées) afin de payer le juste impôt. Ensuite, ce net imposable s’insère dans le mécanisme plus large du calcul de l’impôt sur le revenu au niveau du foyer fiscal, aux côtés des autres revenus, et bénéficie notamment de l’abattement de 10% pour frais professionnels, de la division par le quotient familial, et éventuellement de divers ajustements (décote, réductions/crédits, etc.) pour aboutir au montant de l’impôt figurant sur votre avis d’imposition. En cas de doute ou de question (par exemple sur le calcul de votre net imposable, l’impact d’un élément de paie sur vos impôts, etc.), n’hésitez pas à consulter des ressources fiables ou à solliciter un conseil, car la fiscalité salariale peut être technique. Avec les éléments détaillés ci-dessus et les références légales associées, vous disposez d’une vue complète et à jour du sujet pour 2025.
Sources : Les informations ci-dessus s’appuient sur le Code général des impôts et les publications officielles (BOFiP, service-public.fr, bulletin officiel DSN…), ainsi que sur des ressources spécialisées en paie et fiscalité, notamment , afin de garantir l’exactitude et l’actualité des chiffres et règles présentés.